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« Lavandes » - Nicole Barrière

Publié le par Cristina Castello

miguel ocampo y la luz se hacía

Celui qui nomme exil une porte ouverte, ne sait pas ce que retient le seuil

 

A Cristina Castello et André Chenet

Lavandes lumineuses dans le vertige de vivre

 

 

Lavandes I

 

Alors on te pressait dans un nuage de brumes, et le nuage était un soleil blanc,

et les essences de ton être, grandes lignes de silence, dansaient dans le soleil tremblant

 

Lavandes! douceur fraîche des sachets bleus entre les draps de lin

Douceur extrême posée sur la baptiste des mouchoirs,

ciel profond d'oliviers trop vastes pour l'or du couchant.

 

Ils rêvaient de ce pacte indicible qu'un peintre inventa un soir d'allégresse

et les lavandes hautes dansaient entre deux astres,

inventaient les traits sombres et la terre traversés de printemps

 

quel soleil inaugurait la vague à l'est des lignes courbes?

 

Lavandes! un royaume d'abeilles en distillait le miel

alors se levait un gout de sucre rare, grave comme la bouche de femmes taciturnes

fragiles ombres évadées des paupières

se souvenant de temps heureux.

 

 

 

Lavandes II

 

Grand deuil de femme,

les années disparues

Éclats fabuleux. Clair de terre

Sur leurs hautes tiges mauves

elles appelaient la lune

comme les bergères de ce cri d'oiseau de nuit

Belles et tendres comme des libellules

Évanescentes ailes entre deux murets de pierre sèche - si près de la mort -

on sentait vaciller les paupières au battement d'élytres

le soleil courbait la ligne du ciel.

la lumière chantait près des ruchers

frisson d'oiseaux dans l'air de glace transparente  le soir.

 

Je me souviens du vent,

je me souviens du vent traversant les collines, des larmes vives au coin des yeux

Amour déçu d'une infante

quel jardinier lui rendrait ses jardins de Grenade, ses rêves de pirogues enjambant le destin?

 

Je ne sais plus si le vent arrêtait ses larmes

si l'eau de son sourire abreuvait la nuit.

tandis que le monde vacille entre ses extrêmes

des eaux lentes du soir au lait des galaxies

 

qui réchauffera le cœur noir de l'infante?

 

 

Lavandes III

 

Dans les lavandes toutes sortes de plantes et le silence du matin.

 

on t'appelle. Viendras-tu?

 

Renoue à ta source d'enfance

Lentes plantes humaines

aux croissances incertaines

où tout n'est que rêve et tremplin de lumière

Tendre l'ombre jusqu'aux lisières du rêve

Pouvoir voler le feu

Sans que le malheur en assèche la flamme

 

Et l'onde remuait entre les galets

soulevait un nuage de cendres

et la tristesse des loups que la peur tenaille.

 

Crois encore aux songes, à ce drap de lin bleu  tendu entre les âges

aux eaux vives du torrent bordé de violettes

Traversées d'hiver dans le puits des enfermements

il te faudra renaitre par le soudain éloge du soleil par le ciel bleu

 

Lavandes!

Sans nuage est la nuit étoilée.

 

 

Lavandes IV

 

Il te souvient de ces pleurs au matin des grands bans de tristesse

des nuits trop longues d'insomnie dans l'exil des jours

de l'effroi, de la peur, du silence résistant à l'appel.

Et ce regard de fièvre lente de la mort.

 

Pleure! pleure au creux des vieilles pierres

entre les bras de l'aïeule

pleure!

nul secours ne viendra des racines mais des galets cueillis au fond du lit

 

Lente et pâle tu te lèves, il faudra du courage, tu mettras un grand chapeau de soleil

pour abriter ton rêve,

tu ouvriras grandes les portes de ton exil

pour que les rayons en assèchent le seuil

tu inonderas la pluie venue de l'ouest avec les larmes de la nuit

Tièdes larmes de la douleur du monde que tu ne peux porter seule

 

et voilà à ta bouche la douceur de l'amante, le suc des fleurs en pleine lumière

Midi. la vie sera belle si tu lèves la fleur noire qui couvre tes paupières

à l'ombre des persiennes.

 

 

Lavandes V

 

Il n'y a pas lieu de prier le front entre les mains absentes

Te souviens-tu des heures nocturnes quand dérive le monde entre tes mains?

Te souviens-tu des heures d'aube grise où tu résistes à la nuit?

 

Midi sans ombre t'appelle

Il n'y a pas lieu de prier le front entre tes mains

Va sur les quais oublier l'exil des grands voiliers

où échoue la misère des peuples.

 

Midi des lavandes encore

la terre ferme retient la mer hantée d'illisibles départs

Midi des lavandes toujours

au parfum entêtant des jasmins

Midi ouvert contre les plus vastes crimes

Midi au souffle de ton âge de naître vive

par la seule tendresse au jardin du poème

il y a lieu de prier l'abondante saison d'aimer.

 

 

Lavandes VI

 

 

Lavandes!

sur la haute garrigue veille la flamme bleue des étoiles naines

la voix de blanche lune marche sur l'eau nue.

Les loups se taisent de tristesse, tenaillés par la peur

Torches vives, les lavandes endurent la flamme du rêve étoilé et la solitude des loups.

 

Épilogues

 

Quelques mots blessent la mer

au lait bleu des vagues

Brise lisse du temps

le sang bat dans l'orbe des galets

aux cœurs de pierre

donne la source

 

Pleurerait la colline

au port des grâces

sur le front des vagues

se drape le soleil

dans sa discrète houle

de sang.

 

Frotte le galet

jusqu'à faire luire la jeunesse de la mer.

 

l'irritation des vagues

accuse la lumière

 

la force de l'écume berce le cri  désespéré

la langue étrangère de la mer se comprend au murmure des vagues

 

désormais cette plage que plus rien n'inspire

le jeu solitaire de la baigneuse entre les pages de magazine

l'homme au pas chancelant dérange les galets

 

Ah cette fraicheur d'eau sur les tempes

avant que le sel n'en blanchisse les bords

rive grise - insolence du temps

 

Attendre que la vague t'emporte de l'autre côté de son flanc

quelque chose de rude s'éprend du silence, te brise jusqu'à te rejeter débris de sable.

 

Lumière - tôle renversée où se plissent les vagues

oiseau- essor blanc où chante le zénith

arbre- tronc échoué, seul rescapé de la houle

 

avance entre deux hivers

dans le sillage de l'hirondelle.

28/03/12 Nicole Barrière 

http://nicoletta.over-blog.com/ 

 

Œuvre ©Miguel Ocampo

 

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